Vingt-cinq ans, celibataire, montrealaise, etudiante au doctorat en litterature, aime la randonnee et la musique punk : voila a quoi ressemble en substance la phrase d’accroche sur un blog de rencontre.
Durant les derniers mois, j’ai essaye plusieurs applications Afin de « trouver l’ame s?ur ». Que votre soit Tinder, Bumble, Badoo ou OkCupid, j’observe une constante : la rarete du francais. Prenez, entre autres, la derniere application que j’ai essayee : Bumble. Je fais glisser les profils : Afin de neufs profils rediges en anglais, un seul est redige en francais. Vous croyez que j’exagere, mais il n’en reste rien. Vous me direz que ces applications sont responsables de une telle anglomanie et qu’elles incitent a rediger nos profils en anglais. La bien, il n’en est que dalle. Mise a part une application comme OkCupid, la plupart des applications sont bilingues.
Prenez Bumble, pourquoi pas ; le principe est de repondre a la plupart questions pour se devoiler a toutes les autres utilisateurs. Ces questions paraissent, je le souligne, redigees en francais. On s’attendrait donc a ce que les utilisateurs repondent dans la meme langue (c’est votre principe communicationnel de base).
Or serez-vous etonne d’apprendre que ces anglophiles preferent rompre le pacte en qui repond en anglais a ces questions redigees en francais ?
Bien sur, https://besthookupwebsites.org/fr/manhunt-review/ je garde en tete ma situation geographique. Les profils qu’on me presente seront majoritairement des hommes habitant a Montreal. Cela va de soi qu’il y ait une surrepresentation de profils rediges avec des allophones et anglophones associee a J’ai geolocalisation de l’application. Or, cette surrepresentation m’apparait neanmoins demesuree – neufs individus sur dix ne sont nullement allophones ou anglophones a Montreal.
Ce qui me derange, ce n’est si»rement gui?re qu’un allophone recemment installe a Montreal redige son profil en anglais De sorte i faire de nouvelles rencontres – non, cela me derange reellement, ce qui me glace legerement plus le sang, c’est qu’un Quebecois ayant ete eleve en francais, ayant ete scolarise en francais, travaillant en francais, revant en francais, faisant l’amour en francais, redige son profil en anglais sur un site de rencontre.
Chaque fois que je tombe concernant 1 profil opportun redige en anglais, j’ecris ce meme message d’introduction : « Do you speak French ? » On me repond souvent a grands coups d’oralite : « ben oui », comme si cela allait de soi qu’un profil soit redige en anglais aussi qu’on parle « ben oui » le francais.
Parfois, un profil redige en anglais est suivi une mention « EN/FR ». Chaque fois, un long frisson me traverse. Je ne reponds jamais a ces profils, et votre, meme s’ils paraissent lumineux, stimulants, superbement ecrits. C’est bien la une question de valeur. Notre langue francaise est une de mes valeurs. Oui, tel l’altruisme, la famille ou la protection de l’environnement. Ca me semble inacceptable d’etre ne au Quebec et de vouloir vendre sa salade virile dans la langue d’un ancien pouvoir colonial.
Parce que abriter le francais, ceci commence certainement avec desirer en francais, seduire en francais.
Je vous pose la question : a quel point la langue de Wolfe et d’Amherst est-elle devenue sexy ? Qu’est-ce que ca dit de nous comme Quebecois ? Avons-nous peur a ce point du repli identitaire qu’on ne va plus utiliser J’ai langue de l’ensemble de ses premiers emois – et je ne cause aussi nullement ici de fierte ? Est-ce donc si honteux de se presenter au monde, de se presenter a l’Amour, avec la langue de Papineau ainsi que Bourgault ?
A tous ces hommes anglophiles et « well-travelled », je vous le dis franchement : se presenter comme un « citizen of the world » n’est pas plus attirant que de reclamer son attachement a sa langue et a le territoire.